DROIT DES SERVITUDES


Principes

La servitude est un service foncier, une charge réelle établi sur un fonds, appelé servant, au profit d’un autre fonds, appelé dominant.
La servitude doit procurer un service, une utilité à l'usage d'un fonds, ainsi ne sont pas des servitudes, des services établis et imposés à une personne en faveur d'une autre personne. Dans ce cas, il peut s’agir d’une simple tolérance pouvant être supprimée à tout moment. Si la raison d'une servitude est avant tout économique, elle peut également se justifier par le seul agrément du fonds dominant. Mais alors cet agrément doit présenter un caractère objectif.

Notion de la servitude

La servitude est un droit réel, immobilier, perpétuel et accessoire.

La servitude est un service foncier, une charge réelle établi sur un fonds, appelé servant, au profit d’un autre fonds, appelé dominant. Le fonds dominant doit appartenir à un autre propriétaire.

Conditions d'existence d'une servitude d'utilité privée :

- Un service foncier : il faut que le rappport de service soit institué entre deux fonds, deux héritages (immeubles par nature au sens de l'art. 518 du Code civil).
Il n'est pas nécessaire que ces fonds soient contigus.
- Les deux fonds doivent appartenir à deux propriétaires différents.
- L'un des fonds doit être affecté au service de l'autre. Il ne doit pas s'agir d'une simple tolérance, c'est à dire une charge imposée au propriétaire lui-même du fonds servant.
- En principe les servitudes sont établies à perpétuité quoique la loi prévoie certains modes d'extinction (la confusion, prescription extinctive, perte d'utilité totale) .

La servitude doit procurer un service, une utilité à l'usage d'un fonds, ainsi ne sont pas des servitudes, des services établis et imposés à une personne en faveur d'une autre personne.
Jugé que, "le juge du fond détermine souverainement, en interprétant la clause d'un acte qui confère un droit, si ce droit est un droit de créance (simple tolérance) ou s'il a pour objet une servitude conventionnelle (droit réel)..." (Cass. - 16 mai 1952)

Les servitudes constituent donc un rapport de droit réel entre des héritages et non un rapport de droit personnel entre des personnes.

Toutefois, il n'y a pas lieu de prendre les termes des articles 637 et 686 du code civil dans leur sens littéral : le service foncier profite toujours à des personnes.
Mais, il y a servitude dès que le service est en rapport direct et immédiat avec l'usage et l'exploitation d'un fonds (Cass., Arrêt du 28 janvier 2000).
Nous abordons cette délicate distinction dans nos banques de données de jurisprudence.

Les servitudes présentent en général une nécessité économique, en accordant à un fonds différents services indispensables, en vue de faciliter son exploitation et son rendement.

Cette nécessité économique est un peu la ratio légis de cette matière.

Toutefois, on admet qu'une servitude peut également se justifier par le seul agrément du fonds dominant, en dehors de tout caractère d'utilité économique. Mais alors cet agrément doit présenter un caractère objectif. Il doit, suivant la jurisprudence, constituer un agrément pour le fonds, et non pas un simple avantage personnel au propriétaire.
Jugé que : "Pourvu que cet agrément soit objectif en ce sens qu'il puisse profiter à tout autre propriétaire du fonds dominant".

Ainsi, l'article 637 du Code civil définit la servitude comme une charge, un service foncier à charge d'un héritage au bénéfice d'un ou de plusieurs héritages.
Cette matière est traitée par les dispositions du Code civil

L'article nouveau 710bis du Code civil énonce que lorsque la servitude a perdu toute utilité, le propriétaire du fonds servant peut demander au juge qu'il ordonne sa suppression. La jurisprudence a tendance à exiger que la perte d'utilité soit totale (Cfr. Banques de jurisprudence).

Classification des servitudes

Une première classification distingue les servitudes établies soit pour l'utilité des particuliers, soit pour l'utilité publique (art. 649 C. civil).

Les servitudes établies pour l'utilité des particuliers sont classées en trois espèces de servitudes :

- les servitudes qui dérivent de la situation des lieux (écoulement des eaux, bornage, le droit de se clore)
- les servitudes établies par la loi (servitudes d'utilité publique, tour d'échelle, les jours et les vues, l'égout des toits, servitude pour cause d'enclave).
- les servitudes établies par le fait de l'homme.

Les deux premières catégories constituant plus des limitations au droit de propriété qu'une réelle servitude (service foncier).

Le législateur a estimé en effet que dans certaines circonstances tout propriétaire devait subir, soit dans l'intérêt de ses voisins, soit dans l'intérêt de la collectivité, des restrictions à son droit, ce qui constitue des limitations appportées au droit commun de la propriété (Cfr. menu du droit des jours et des vues).

On établit également une classification en fonction d'un certain nombre de critère :

- Servitudes continues et discontinues. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait de l'homme (Les égouts, les vues). Les servitudes sont discontinues lorsqu'elles ont besoin de l'homme pour être exercées (droit de passage, puisage,etc.).
- Servitude apparentes et non-apparentes. Les servitudes apparentes sont celles qui s'annoncent par des ouvrages extérieurs, tels une porte, une fenêtre, une gouttière,etc.
Les servitudes non-apparentes sont celles qui n'ont pas de signe extérieur de leur existence.

Caractère des servitudes


- Servitudes naturelles, qui découlement de la nature : un cour d’eau, les différents propriétaires devront respecter la servitude d’écoulement des eaux
- Servitude apparentes ou non apparentes : servitude que l’on peut voir par des signes extérieurs (des jours) et celles que l’ont ne peut voir (canalisation)
- Servitudes continues ou non-continues : les servitudes continues n’ont pas besoin de l’intervention humaine pour être exercée (jours), les servitudes discontinues ont besoin de l’intervention humaine (servitudes de passage).
- Servitude du faits de l’homme.

Rappelons qu'on définit l'héritage comme un immeuble par nature au sens de l'article 518 du Code civil, soit un fonds de terre ou un bâtiment.

§1 Un droit réel


La servitude est un droit réel.
Un droit réel, car ce n’est pas un service fourni et imposé de personne à personne, mais un service foncier imposant une charge d’un fonds pour l’utilité d’un autre fonds.
Etant un droit réel immobilier, il devra être acté dans un acte notarié et transcrit à la conservation des hypothèques pour le rendre opposable aux tiers, aux ayants droits et ayants causes.

Toutefois, le titre générateur d'une servitude peut être une convention sous seing privé ou même un testament (Jugé qu'une servitude non aedificandi peut être créée par une clause testamentaire dès lors que celle-ci établit une charge au profit d'un fonds et non un avantage au profil d'une personne (JP Fexhe-Slins, 24 novembre 1976, JJP, 1978, p.94).

Les dispositions de l’article 637 du Code civil, énoncent qu’ une servitude est une charge imposée sur un héritage pour l’usage et l’utilité d’un héritage appartenant à une autre propriétaire.

La servitude est donc attachée à un immeuble et non au propriétaire de l’immeuble, et son existence devra être respectée quel que soit la personne qui occupe le bien.

Conséquence de cette charge foncière.
Ne sont pas des servitudes mais des obligations personnelles :

- l’obligation, pour l’acquéreur d’un immeuble, d’affecter ce dernier à un usage déterminé ;
- l’obligation de construire dans un certain délai ;
- toutes les obligations de faire ;

Il existe toutefois une hypothèse où la servitude peut entraîner, à titre accessoire, une obligation de faire pour le propriétaire du fonds servant : l’article 698 permet de mettre à sa charge les frais des ouvrages nécessaires pour user de la servitude, et pour la conserver.

Quand peut-on dire qu’un service foncier profite à un immeuble, et non à une personne ?

Dans un arrêt du 16 mai 1952 de la Cour de cassation, le critère déterminant est de savoir si le droit envisagé procure au fonds une plus-value, ou tout au moins une commodité.

§2. Un droit réel accessoire :


Les différents propriétaires de l’immeuble sur lequel la servitude est établi devront la respecter. Ainsi, le transfert de propriété du fonds servant, entraîne ipso facto le transfert des servitudess.
Il en résulte :
- qu'un droit de servitude ne peut être cédé sans l'un des fonds auquel il s'attache ;
- qu'il n'est pas nécessaire, pour qu'un servitude se transmette, d'en mentionner l'existence dans l'acte translatif du fonds dominant, ou du fonds servant. Suivant les dispositions de l'article 1615 du Cide civil, les servitudes sont comprises parmi les accessoires de la chose vendue.
Toutefois, si le fonds vendu se trouve grevé de servitudes non apparentes, importantes et non déclarées, l'acheteur peut demander au vendeur des dommages et intérêts, ou même la résolution de la vente (art. 1638 c.c.).
- que la servitude est insaisissable sans le fonds dominant ;
- qu'elle n'est pas susceptibles d'hypothèques, sans le fonds dominant;

§3. Un droit réel, immobilier, perpétuel :

En principe, la servitude étant établie pour l'usage d'un autre fonds, doit en conséquence durer aussi longtemps que les fonds entre lesquels elle est établie. Elle est perpétuelle et irrévocable et devra être respectée par tout tiers détenteurs de la propriété.
Le propriétaire du fonds servant n'aurait pas le droit, de la racheter, contre le gré du propriétaire du fonds dominant.
Mais ce caractère n'est pas essentiel. Une servitude peut être temporaire ou à terme.
Jugé que, "la servitude établie par le fait de l'homme est par sa nature, perpétuelle, aucun règle légale ne s'oppose à ce qu'elle soit constituée sous une condition résolutoire ou pour une durée déterminée (Cass. arrêt du 16 mai 1952).

L'article 710bis nouveau de Code civil, autorise le propriétaire du fonds de demander au juge la suppression de la servitude lorsque celle-ci n'a plus d'utilité, même si elle est encore nécessaire au fonds dominant.
Nous étudions ce point dans nos chroniques de jurisprudence.

Rappelons, que les servitudes peuvent s'éteindrent dans trois cas :
- l'impossibilité d'user de la servtitude;
- le non-usage pendant 30 ans;
- la renonciation.

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- Servitudes d'intérêt public
- Servitudes et prescription
- Servitudes et Transcription



JURISPRUDENCE RECENTE

- Servitude de passage - mention marginale de la demande de suppression - perte de toute utilité (710bis C. civil.) : La demande tendant à la suppression d'une servitude de passage née par titre pour cause de «perte de toute utilité» doit être mentionnée en marge conformément à I'article 3 de la loi hypothécaire.
Pour que le critère «perte de toute utilité» puisse être pris en considération pour supprimer une servitude, celle-ci doit avoir perdu toute utilité pour le fonds dominant. La perte d'utilité doit être complète. D'autres critères, comme la question de savoir si l'utilité de la servitude pour le fonds dominant est proportionnelle à la charge de la servitude pour le fonds servant, ne peuvent être acceptés.
On ne peut pas comprendre sous le terme d'utilité dans le sens de l'article 7I0bis du Code civil uniquement I'utilité actuelle pour le fonds dominant; il faut également tenir compte de l'utilité future ou potentielle. La servitude doit en outre être restée utile pour le fonds servant, non pour son propriétaire ou son usager (JJP¨2017, p.).
Justice de paix de Merelbeke : Jugement du 23 juin 2015

- Droit de passage - fonds enclavé - conditions pour l'octroi de la servitude : Lorsqu'un propriétaire d'un fonds n'a plus d'issue sur la voie publique, il réclame à bon droit un passage sur les parcelles qui donnent accès à la voie publique (C. civ., art. 683, al. 2).
L'assiette du passage est fixée par le juge de façon à ce qu'il soit le moins dommageable (C. civ., art. 683, al. ler).
L'action en attribution du requérant est cependant limitée par l'usage normal de sa propriété d'après sa destination (C. civ., art. 682, § ler) (JJP 2017, p.).
Justice de paix de Kapellen, Jugement du 12 janvier 2016