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La possession


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Les actions au possessoire


- Défintion

Aux termes de l'article 2228 du Code civil, la possession constitue : "le jouissance d'une chose ou d'un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-même, ou par un autre que la tient ou qui l'exerce en notre nom".
Ainsi, la possession est un état de pur fait. Selon l'arrêt de la Cour de cassation du 14 octobre 1926, la possession est "la manifestation extérieure de la prétention à un droit".

Il ne faut toutefois pas se limiter à l'élément matériel de la possession (le corpus), au risque d'établir une confusion entre la notion de détention et celle de possession, notions qui engendrent des conséquences différentes.
La possession juridique implique le corpus possessionis, la mainmise matérielle sur la chose, mais en plus l'élément intentionnel qui est l'animus possessionis ou la volonté d'exercer un droit à son profit animo domini, l'animus sibi habendi, la volonté de se comporter comme un propriétaire.
Alors que la détention existe dès qu'il existe la simple détention matérielle du corpus.
Cette différence est marquée par les dispositions de l'article 2236 du Code civil qui disposent que "ceux qui possèdent pour autrui ne prescrivent jamais, par quelque laps de temps que ce soit".

- Caractéristiques de la possession

Pour produire des effets en droit, la possession doit impérativement remplir une série de caractéristqiues.

Ces caractéristiques sont énumérées à l'article 2229 du Code civil aux termes duquyel, "pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriété".

Ainsi, la possession est envisagé par le législateur, comme une sorte de socle de la prescrription dont elle semble indissociable du moins en matière immobilière (JT, Romain "Bicentenaire du code civil", JT, n° 6132, p. 340).

- Les actions possessoires

La possession des immeubles et des droits réels immobiliers fait l'objet d'une protection particulière : les actions possessoires. Ce sont des actions qui protègent aussi bien le possesseur que le détenteur, indépendamment de la question de la propriété. Si la question de propriété est soulevée, elle ne peut être tranchée que dans le cadre d'une instance séparée (Pétitoire) ou à titre subsidiaire (Voyez cassation, banque de jurisprudence).

L'objectif de ces actions est de permettre au possesseur de récupérer non seulement la situation matérielle dont il jouissait, mais surtout l'usucapion, que le trouble risquait d'interrompre ou de compromettre.
L'action en réintingrande protège également le simple détenteur, sans aucune prétention à l'usucapion. Cette action doit être introduite dans l'année qui suit le trouble sans même qu'il ne doive s'agir d'une véritable possession à titre de propriétaire ou à titre de titulaire de droit réel. S'il s'agit d'une détention, il faut que celle-ci soit certaine, actuelle au moment de la dépossession.

Conditions des actions

Il existe trois actions possessoires :


- la complainte (possession)
- la dénonciation de nouvel oeuvre (possession)
- la réintégrande (possession et détention)

Ces actions, la complainte et la dénonciation de nouvel oeuvre, d'une part, et la réintégrande, d'autre part, poursuivent des objectifs bien différents.

- La complainte et la dénonciation de nouvel oeuvre ont pour objectif de protéger la possession véritable (Conditions : avoir été en possession durant une année, et possession utile) et réunissent les qualités requises par les articles 2228 et 2235 du Code civil, à savoir une possession utile pour prescrire. Cette action est visée à l'article 1370 du Code judiciaire.

- La dénonciation de nouvel oeuvre a pour objet de faire ordonner la suspension de travaux qui, sans causer un trouble actuel à la possession du demandeur, produirait ce résultat s'ils étaient achevés. C'est une anticipation sur la complainte.

L'exercice de la complainte requiert que le demandeur prouve avoir été en possession pendant une année au moins et que sa possession est utile pour prescrire. A défaut pour le demandeur de pouvoir faire état d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, la complainte est irrecevable. La complainte suppose donc l'existence d'un trouble de fait ou d'un trouble de droit (Cfr. Banques de jurisprudence).

Jugé La demande de permis, introduite par une commune, de démolir un mur qui menace ruine constitue un trouble de droit qui justifie l'exercice d'une complainte par le possesseur du dit mur; Par cette demande, la commune manifeste, en effet, une prétention à la propriété contraire à la possession. La circonstance que le Conseil d'Etat ait suspendu le permis finalement accordé à la commune ne prive nullement la complainte de son intérêt (JLMB, 2011/24, p. 1162).
Justice de paix de Grâce-Hollogne, jugement du 1er septembre 2009

- La réintégrande est plutôt une mesure de police qui vise à protéger le possesseur ou le détenteur afin qu'il ne soit pas privé de sa possession et de sa détention, avant que ne soit tranché le dossier de fond. La réintégrande suppose un trouble grave, une voie de fait ou des violences.
Une telle action est recevable en référé.
Cette mesure permet ainsi au possesseur ou au détenteur d'être réintégré dans sa possession ou sa détention.
Dans le cadre de cette action, le demandeur ne doit pas faire état d'une possession utile durant une année (Art. 1370, al.2, C. jud.) et les dispositions des articles 2228 et 2235 ne sont pas requises.

La réintégrande requiert que le trouble ou la dépossession ait été causé par violence ou voie de fait.

Jugé que l'action en réintégrande tend au maintien de la paix publique et appartient à tout détenteur, à quelque titre que ce soit, troublé dans sa jouissance par violence ou voie defait.
En vertu de l'article 1370, dernier alinéa, du code judiciaire, le demandeur en réintégrande ne doit pas faire la preuve de l'existence, dans son chef, d'une possession présentant les caractères définis aux articles 2228 à 2235 du code civil (Cass. 19 octobre 2007).

Jugé que les locataires d'un immeuble ne peuvent bénéficier que de la réintégrande.
Un locataire est en effet toujours détenteur du bien loué et ne peut, en conséquence, satisfaire à l'exigence d'un possession utile pour prescrire.

Comprise comme une mesure de police, l'action en réintégrande ne tranche pas une question qui se pose à propos des droits du détenteur tire d'une convention. Tout en respectant la règle du non cumul du possessoire et du pétitoire, la seule existence d'une convention entre les parties ne peut peut faire obstacle à la reconnaissence de la protection possessoire, que ce soit entre locataires et bailleurs, entre nu-propriétaires et usufruitiers, entre titulaires des fonds servants et dominants, entre copropritaires...

Jugé que l'article 2229 du code civil dispose que « pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire », et s'il incombe au demandeur au possessoire d'établir le fait de la possession, ce qu'il est autorisé à prouver par toutes voies de droit, en revanche, lorsqu'il est prétendu que le trouble de jouissance est causé par violence ou par voie de fait, il ne peut être imposé au demandeur à l'action possessoire dite «réintégrande », de démontrer qu'il était titulaire d'un droit de propriété sur le bien immobilier qui fait l'objet de son action. Il suffit que le demandeur exerce un pouvoir de fait quelconque sur l'objet immobilier, à quelque titre que ce soit (Cass. 19 octobre 2007).




L'usucapion et les effets


L'usucapion fait acquérir la propriété.
Comme toute prescription, l'usucapion ne joue jamais de plein droit (C. civ., art. 2223).
Il appartient au possesseur de décider s'il usera ou non de ce moyen.
Mais s'il l'invoque la propriété lui est irrévocablement acquise.

L'usucapion n'a d'autre effet que rendre inattaquable l'acquisition du droit, possédé dans les conditions légales : elle met le possesseur à l'abir de l'éviction.

Toutefois, l'usucapion ,n'éteint pas les droits réels : l'usufruit (C.civ., art. 617), les servitudes (art. 706, les hypothèques (loi hyp., art. 108, al. 8).